Page:Bouilhet - Œuvres, 1880.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée




LES FOSSILES.

A Gustave Flaubert.

I


Un air humide et lourd enveloppe le monde ;
Aux bords de l’horizon, comme des caps dans l’onde,
Les nuages rayés s’allongent lentement,
Et le soleil, immense au fond du firmament,
Heurtant au brouillard gris sa lueur inégale,
Sur le globe muet penche son disque pâle.
Aucun bruit sur la terre, aucun bruit dans les cieux,
Que l’oscillation des grands océans bleus !
Les granits, se tordant en postures difformes,
Dans les espaces nus dressent leurs blocs énormes,
Tandis que ça et là, sur leur flanc dépouillé,
Jaunit la mousse maigre et le lichen rouillé !
Parfois, un large éclair, échappé de la nue,
De sa fauve lueur embrase l’étendue,
Et du monde ébranlé les volcans mal éteints
Répondent sourdement aux tonnerres lointains.
Les nuits, les longues nuits tendant leurs voiles sombres,