Page:Bouilhet - Dernières chansons.djvu/165

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Sans un pleur de ses yeux, sans un cri de sa bouche,
Il sentit l’abandon tomber du ciel farouche ;
Et, vers ce monde étrange où le sort le conduit,
Marcha sous le soleil, sombre comme la nuit !…

— Je te salue, ô toi, premier-né d’Aphrodite,
Dont le règne est perdu dans un autre univers !
Ton histoire aux humains n’a jamais été dite ;
Nul poëte amoureux ne t’a donné ses vers !

Ton nom puissant, formé de syllabes bizarres,
Est un de ceux qu’en vain les savants chercheront.
Il n’a sonné qu’au bruit des instruments barbares,
Autour d’un feu nocturne, où l’on dansait en rond !

Tu n’es pas cet enfant qui voltige à Cythère,
Parmi les bois de myrte et les rosiers fleuris,
Et qui, sa trousse au dos, va guidant par la terre
Le frais essaim des jeux, des grâces et des ris !

Ton temple n’est ouvert, sur tes âpres rivages,
Qu’à des adorateurs prosternés et rampants ;
Car tu sais la vertu des floraisons sauvages,
Et tes dards sont trempés au venin des serpents !