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776 ÉLÉMENTS DE L’ART HÉRALDIQUE.


avait le cri général pour toute l'armée, celui du souverain ou du commandant en chef. Le cri des rois de France était Mont-joie Saint-Denis ; ce cri, sur l'origine duquel on n'est pas d'accord, mais qui fait allusion à la prise de l'oriflamme à Saint-Denis, ne remonte pas au delà du règne de Louis le Gros. D'autres grandes familles avaient des cris analogues. La maison de Bourbon : Mont-joie NotreDame ; celle des ducs de Bourgogne : Mont-joie au noble duc et Châtillon au noble duc ; les comtes de Champagne : Passavant le meillor ; les ducs de Savoie : Saint- Maurice et Savoye ; ceux de Flandre : Flandre au lion ; ceux d'Auvergne : Clermont au dauphin d'Auvergne ; les ducs de Bretagne : SaintMalo au riche duc ; ceux de Brabant : Louvain au riche duc. Tout le monde connaît le cri de guerre des croisés : Dieu le veut ; celui des Montmorency : Dieu aide au premier baron chrétien ; celui des Beauffremont : Dieu aide au premier chrétien. Un des cris de guerre les plus usités était le cri du nom de la famille du baron qui conduisait ses vassaux à la guerre. Les Créquy, les Rohan, les La Trémouille, les Damas, les Duras, les Du Guesclin, les Mailly, les Renty, les Clermont, les Châtcaubriant, les Vergy et tant d'autres familles n'en avaient pas d'autre. On criait aussi le nom des maisons d'où on était sorti : les rois de Navarre : Bigorre, Bigorre ; les sires de Beaujeu : Flandre ; les Saint-Paul : Lusignan. Le cri de guerre consistant dans le nom de famille, se transmet avec les armoiries ; il est la propriété de l'aîné de la famille ; les cadets ne peuvent le prendre qu'en y ajoutant le nom de leur seigneurie principale. Il se place au-dessus du cimier, dans un listel ondoyant, aux couleurs de l'écu.

Devise. La devise est une pensée exprimée en un petit nombre de mots et faisant allusion à un sentiment, à un dessein, à une qualité, à un souvenir historique, ou contenant un stimulant au courage et à l'honneur. Elle était choisie par le chef de la famille, par le chevalier prêt à entrer dans la lice du tournoi, ou donnée par le prince au seigneur qu'il attachait à son service et dont il recevait l'hommage lige. Il y en a de plusieurs sortes : Les devises faisant allusion, par une sorte de jeu de mots, au nom des familles qui les portent : la maison de Vienne, au comté de Bourgogne : Tost ou tard vienne, ou à bien vienne tout ; les Vaudray, de la même province : Tay valu, vaux et vaudray ; les Viry, du même pays : A virtute, viry ; les Du Butet, en Savoie : La vertu mon but est ; les ducs de Nemours, de la maison de Savoie : Suivant sa voye.

Celles qui se rapportent aux pièces des armoiries, du cimier et des supports : les Vogué, en Vivarais, qui ont un coq dans leurs armes, ont pour devise : Vigilantia ; les Cassard, en Dauphiné, qui portent d'azur à la licorne d'argent : Sans venin.

Les devises composées de mots énigmatiques ou à sens couvert : Philippe le Bon, duc de Bourgogne, avait pour devise : Autre n'aurai ; Charles de Bourgogne, son fils : Je l'ay empris, et Marguerite d'Yorck, son épouse : Bien en avienne ; Philippe de Brimeu : Plus que d'autres ; Jean de Comines : Sans mal ; Jean de La Trémouille : Ne m'oubliez ; Jean de Croy, comte de Chimay : Souvienne vous ; Philippe de Croy. J'y parviendray ; Charles de Croy, son fils : Je maintiendray.

Il y a des devises composées de proverbes, de sentences ; celle des Brissac : Virtute et tempore ; de mots devenus historiques ; celle des Coucy : Je ne suis roy ne prince aussi, je suis le sire de Coucy ; des Rohan : Roy ne puis, duc ne daigne, Rohan suis ; d'invocation, celle de Du Guesclin : NotreDame, Guesclin ; de simples lettres initiales, comme celle de la maison de Savoie : F. E. R. T., dont on donne plusieurs interprétations et qui est encore la devise de l'ordre de l'Annonciade. Les rébus ont

servi de devises. Au nombre de celles qui sont formées de simples figures, on peut citer le chardon des ducs de Bourbon, la rose blanche et la rose rouge des maisons d'Yorck et de Lancastre. Les devises de figures et de mots sont fréquentes : les Montmorency ont une épée avec le mot grec aplanos ; celle du cardinal de Bourbon était un bras armé d'une épée flamboyante et les mots n'espoir ny peur ; tout le monde connaît la devise de François Ier : une salamandre dans le feu avec ces mots : Nutrior et extinguo ; celle de Louis XIV : un soleil et le fameux nec pluribus impar ; celle de l'ordre de la Jarretière : Honni soit qui mal y pense.

La devise se place au bas de l'écusson, dans un listel de couleur ; les lettres de la légende sont de métal ; couleur et métal sont pris des émaux de l'écu. Lorsque la devise se confond avec le cri de guerre, elle se met comme lui au-dessus des armoiries.

Colliers d'ordres. On les voit figurer parmi les insignes qui accompagnent les armoiries des maisons souveraines. L'ancien écusson de France est posé sur les ordres de Saint-Michel et du SaintEsprit ; le nouveau est entouré de l'ordre de la Légion d'honneur ; celui de la Jarretière encadre les armes d'Angleterre ; il en est de même pour les armoiries des autres puissances de l'Europe ; elles sont ornées de leurs principaux ordres.

Pavillons et manteaux. Le pavillon est une sorte de dôme sous lequel se placent les armoiries des souverains ; il est surmonté de la couronne impériale ou royale. Les rois de France et les autres princes souverains de la maison de Bourbon ont un pavillon de velours bleu, semé de fleurs de lis d'or et doublé d'hermine ; celui de l'empereur des Français est semé d'abeilles d'or ; les autres souverains°de l'Europe, à l'exception de celui de Turquie, qui a un pavillon vert, le portent couleur de pourpre ; la doublure en est toujours d'hermine. Les princes souverains et les ducs qui relèvent d'une autorité supérieure entourent leurs armes d'un manteau doublé d'hermine et sommé de leur couronne. Les ducs titrés et les princes de l'empire germanique portaient le manteau de pourpre ; les pairs de France le surmontaient d'une toque entourée de la couronne indiquant leur titre ; ce manteau était bleu foncé ; celui des chanceliers de France était en drap d'or- les présidents au Parlement de Paris le portaient ecarlate doublé d'hermine ou de petit-gris. '

Insignes et attributs. Certains ornements servaient à reconnaître les dignités ou charges de la France ancienne. Le connétable avait son écu posé sur un dextrochère et un senestrochère sortant d'un nuage et portant une épée nue, la pointe en haut. Le grand amiral posait son écu sur deux ancres en sautoir ; les vice-amiraux n'en avaient qu'une posée en pal ; le général des galères avait derrière son écusson une ancre double. Les maréchaux de France portaient deux bâtons d'azur semés de fleurs de lis d'or, passés en sautoir derrière l'écu ; le colonel général de l'infanterie avait derrière son écusson et de chaque côté du cimier deux drapeaux blanc et azur ; le colonel général de la cavalerie portait quatre petits drapeaux blancs fleurdelisés, dits cornettes, et disposés comme ceux du colonel général de l'infanterie -, lé grand maître de l'artillerie appuyait son écusson sur deux canons posés sur leurs affûts. L'écu du chancelier de France était posé sur deux masses en sautoir, entouré d'un manteau de pourpre, timbré d'une couronne ducale sommée d'un mortier rond en toile d'or, brodé de même et retroussé d'hermine ; et pour cimier la France sous la figure d'une reine, tenant de la main droite un sceptre et de la gauche les sceaux du royaume. Le surintendant des finances accostait son écu de deux clefs, l'une d'or, l'autre d'argent, posées en pal ; le grand maître de France appuyait