Page:Bouillet - Chassang - Dictionnaire universel d'histoire-geo - 1878 - P2 - H-P.djvu/300

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et leurs alliés par le maréchal Maurice de Saxe, ajoutèrent à la supériorité de nos armes; mais dans le même temps nos affaires étaient dans le plus mauvais état en Italie : la bataille de Plaisance, perdue par Maillebois (1746), força les Français à repasser les Alpes. Alors fut signée la 2e paix d'Aix-la-Chapelle (1748), par laquelle la France rendit les conquêtes qu'elle venait de faire en Savoie et dans les Pays-Bas. En 1756 commença la guerre de Sept ans (V. ce mot), dans laquelle la France, devenue l'alliée de l'Autriche, eut à combattre l'Angleterre et la Prusse, guerre désastreuse, signalée par la défaite de Rosbach en 1757, et par la perte de notre marine et de nos colonies. Elle fut terminée en 1763 par le traité de Paris, qui abandonnait à l'Angleterre le Canada, la Nouvelle-Écosse et presque toutes nos possessions dans l'Inde. Le reste du règne de Louis ne fut signalé que par le bannissement des Jésuites (1762), l'héritage de la Lorraine (1766), l'acquisition de la Corse (1768), et l'abolition des parlements, que provoqua le chancelier Maupeou (1771). Louis XV mourut en 1774 de la petite vérole (en 1757, il avait été frappé par un assassin, Damiens; mais la blessure n'avait eu aucune gravité). Paris doit à ce prince l’École militaire (de Paris), l'église Ste-Geneviève (Panthéon), ainsi que la belle place qui porta d'abord son nom et qui est auj. la Place de la Concorde (V. ce nom). Louis XV eût pu être un grand roi : il ne fut qu'un prince faible, débauché, insouciant; il amassa les orages qui éclatèrent sur son successeur. Ses principaux ministres, après Fleury, furent le duc de Choiseul, qui s'efforça en vain de relever la France, l'abbé Terray, qui ne songea qu'à pressurer le pays, Maupeou, qui, en détruisant les parlements, renversa la seule barrière opposée à l'abus du pouvoir; le duc d'Aiguillon, qui laissa démembrer la Pologne (1772). Deux femmes surtout firent le malheur et la honte de ce règne : la marquise de Pompadour et Mme Dubarry : elles exercèrent sur le roi un pouvoir absolu. La Vie privée de Louis XV a été écrite par d'Angerville, 1781. Voltaire a donné un Précis du Siècle de Louis XV, et M. de Tocqueville l’Histoire philosophique du règne de Louis XV, 1846. M. Boutaric a publié la Correspondance secrète inédite de Louis XV avec le comte de Broglie, etc., sur la politique étrangère, 2 vol. in-8, 1865.

LOUIS XVI, petit-fils et successeur de Louis XV, né en 1754, d'abord connu sous le nom de duc de Berry, monta sur le trône en 1774, et signala les commencements de son règne par des actes qui obtinrent l'approbation universelle : il renonça au droit onéreux de joyeux avénement, rétablit les parlements, abolit la question, créa le Mont-de-Piété, la Caisse d'escompte, appela au ministère les hommes désignés par l'opinion publique, Maurepas, Turgot, Malesherbes, Necker; donna des secours aux Américains opprimés par l'Angleterre (1778-1783), et assura leur indépendance par le traité conclu à Versailles (178S). Les finances, dilapidées sous les règnes précédents, étaient réduites à un état déplorable : le roi convoqua pour chercher un remède deux assemblées de Notables (22 février 1787 et 6 novembre 1788); mais ces assemblées se séparèrent sans remédier à rien, et Louis se vit obligé de recourir aux États généraux. Ces États furent ouverts à Versailles le 5 mai 1789 : les discussions qui s'y élevèrent dès le principe entre les trois ordres firent naître une fermentation générale, qui fut bientôt augmentée par l'ordre donné aux députés du Tiers-État, réunis en Assemblée nationale, de se séparer immédiatement (V. JEU DE PAUME.) Alarmé par plusieurs démonstrations populaires, le roi fait approcher des troupes de Versailles et de Paris; en même temps il congédie le ministre Necker, qui jouissait de la faveur publique (11 juillet); le peuple de Paris irrité court aussitôt aux armes et s'empare de la Bastille (14 juillet); bientôt il se porte en masse à Versailles et force le roi et sa famille à venir s'établir à Paris (5 et 6 octobre). Dès ce moment Louis XVI cessa d'être libre; il se vit contraint de sanctionner une foule de décrets de l'Assemblée nationale qui froissaient ses sentiments les plus chers; enfin, ne se croyant plus en sûreté, encouragé d'ailleurs par les offres des puissances étrangères, il résolut de fuir (20 juin 1791), et se dirigea vers Montmédy, où un serviteur dévoué, le marquis de Bouillé, avait réuni des troupes sûres; mais, reconnu par le maître de poste Drouet, il fut arrêté à Varennes et ramené à Paris; de ce moment il fut gardé à vue et ne régna plus que de nom. Le 14 septembre 1791, Louis accepta la Constitution que venait de rédiger l'Assemblée nationale; cette constitution, qui ne lui laissait guère d'autre droit que celui de mettre son veto aux décrets des corps législatifs, ne pouvait que le rendre odieux. Les déclarations de guerre des puissances étrangères qui, sollicitées par les princes émigrés, venaient d'entrer en France, aggravèrent encore la position du malheureux roi. Après avoir été insulté jusque dans son palais dans les journées des 20 juin et 10 août (1792), et avoir vu massacrer ses plus fidèles serviteurs, il se trouve réduit à chercher un refuge au sein de l'Assemblée législative, qui avait remplacé l'Assemblée nationale; mais, au lieu de le protéger, cette assemblée le suspend de ses fonctions, le fait enfermer au Temple, laissant à la Convention le soin de prononcer sur son sort. La Convention, réunie le 21 septembre 1792, commence par décréter l'abolition, de la royauté, et se donne mission de juger Louis XVI. Après un simulacre de procès et malgré les généreux efforts de ses défenseurs Malesherbes, Tronchet, De Sèze, il est déclaré coupable de conspiration et de haute trahison et condamné à la peine capitale, à une majorité de onze voix (366 contre 355). Tout sursis ayant été rejeté, la sentence reçut son exécution le 21 janvier 1793, sur la place de la Révolution; l'infortuné monarque subit le dernier supplice avec une résignation toute chrétienne, qui lui a mérité le surnom de roi martyr. Son testament, rédigé peu de jours auparavant, est remarquable à la fois, par une touchante simplicité et par la générosité de la victime envers ses bourreaux. Ce prince eut toutes les vertus de l'homme privé; mais il manqua de fermeté, de résolution, peut-être même quelquefois de franchise. Il avait de l'instruction, surtout en histoire et en géographie; on lui attribue quelques ouvrages; il rédigea de sa propre main les instructions données à La Pérouse (1785). Il aimait les arts mécaniques et excellait même dans la serrurerie. Louis XVI avait épousé Marie-Antoinette d'Autriche, qui partagea ses malheurs; il laissa deux enfants : Louis (dit Louis XVII) et Marie-Thérèse de France (duchesse d'Angoulême). On peut consulter sur ce prince les Mémoires de Cléry, de Hue, d'Edgeworth, de Soulavie, l’Hist. de Louis XVI, par Droz (1839), de Falloux (1840), les Mémoires sur la Révolution, la Correspond. de Louis XVI et de Marie-Antoinette, publ. par Feuillet de Conches (1835).

LOUIS XVII, 2e fils de Louis. XVI, né le 27 mars 1785, porta d'abord le titre de duc de Normandie, et prit celui de dauphin à la mort de son frère aîné Louis-Joseph (4 juin 1789). Enfermé au Temple avec sa famille, il fut, après la mort de son père (1793), reconnu roi par les émigrés et les puissances étrangères sous le nom de Louis XVII. La Bretagne, la Vendée et Toulon prirent les armes en son nom : mais il était gardé à vue, on ne put l'enlever. Un cordonnier, nommé Simon, officier de la Commune, lui fut donné pour geôlier, avec le titre dérisoire d'instituteur. Le prince mourut le 8 juin 1795. On soupçonna qu'il avait été empoisonné, mais il est plus probable que sa vie fut abrégée par les mauvais traitements qu'il eut à subir dans sa prison. Plusieurs imposteurs ont voulu se faire passer pour Louis XVII, mais ils n'ont fait qu'un petit nombre de dupes. La Vie de Louis XVII été écrite par A. de Beauchesne, 1853.

Louis XVIII, frère de Louis XVI, né en 1765, m. en 1824, porta jusqu'en 1795 les titres de Monsieur et de Comte de Provence et prit pendant son exil celui