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néo, les archipels de Sumbava, de Timor, des Moluques, la Terre et l'Ile des Papous. La population totale de ces colonies s'élève à 16 000 000 d'hab.

Le pays est partout plat et quelquefois même au-dessous du niveau de la mer et n'est défendu contre les inondations de l'Océan que par un ensemble admirable de digues; un vaste système de canalisation donne aux eaux un libre cours. Les principaux cours d'eau sont : l'Escaut, la Meuse (qui reçoit la Roër, le Wahal et la Lech), le Rhin, l'Yssel, l'Amstel, l'Y, l'Hunse, le Vecht, l'Ems. Parmi les nombreux canaux qui sillonnent la Hollande, ou distingue ceux du Nord (d'Amsterdam à Nieuwdiep), de Zederik (de Vianen à Gorkum), de Zuid-Williems-Waast (de Bois-le-Duc à Maëstricht), de l'Ems au Zuyderzée. Les principaux chemins de fer sont ceux d'Amsterdam à Rotterdam par Harlem, Leyde, La Haye, Delft et Schiedam (83 kil.) ; d'Amsterdam à Arnheim par Utrecht (93 kil.); de Rotterdam à Utrecht, par Wœrden et Gouda (53 kil.); de Maëstricht à Aix-la-Chapelle (35 kil.). Les empiétements de la mer ont formé plusieurs golfes sur les côtes : le Dollart, le Laauwersée, entre les prov. de Frise et de Groningue, le Bies-Bosch, près de Dordrecht; le Zuyderzée, entre la prov. de Hollande et la Frise (ce golfe était un lac avant 1225, ainsi que le Dollart) ; la mer de Harlem, vaste lac, formé il y a trois siècles, par une inondation, et récemment desséché (V. HARLEM). — Les côtes de la Hollande sont semées d'îles nombreuses qui se partagent en deux groupes : le groupe septentrional, à l'entrée du golfe de Zuyderzée et le long de la Frise (il comprend les îles de Wieringen, Texel, Vlieland, Terschelling , Ameland, etc.); le groupe méridional, comprenant les îles formées par les différents bras de l'Escaut, de la Meuse et du Rhin (les principales sont celles de Kadsand, Nord et Sud-Béveland, Walcheren, Tholen, Schouwen, Over-Flakee, Voorn et Beyerland). — La Hollande abonde surtout en pâturages; on y cultive avec succès le blé, le lin, la garance, le tabac, les fruits ; l'agriculture et l'horticulture y sont poussées à un haut degré de perfection. Le climat est brumeux et humide ; les habitants des Polders (marais) et des îles sont exposés à des fièvres endémiques ; cependant le froid des hivers et les vents d'est corrigent l'insalubrité de l'air. L'industrie est très-active : elle consiste principalement en toiles, connues sous le nom de toiles de Hollande, blanchisseries, papeteries, draps, étoffes de soie, velours, tanneries, faïence, pipes, fromages dits de Hollande (on en fabrique annuellement 15 millions de kilogr. environ); produits chimiques, librairie, gravures, taille de diamants, etc. Le commerce, bien que moins étendu qu'autrefois, est encore très-considérable : les principales importations consistent en grains, sels, vins, bois, draps, etc.; les exportations, en toiles, fromages, beurre, viande et poisson salés, épiceries, garance, etc.; il faut ajouter en outre le change, le commerce de commission, celui de fleurs, la pêche de la baleine et du hareng. — La Hollande possède une littérature assez riche : elle compte des poëtes et des littérateurs du 1er rang : Vondel, Catz, Van Hooft, de Haren, Feith, Bilderdik; elle est la terre classique de l'érudition et a produit Érasme, Ruhnkenius, les Heinsius, Hemsterhuys, Wyttenbach, Heyne, etc. Dans les sciences, elle cite Huyghens, Boërhaave, Swammerdam, Musschenbrœk, etc. Le Hollandais aime la symétrie et se distingue par une minutieuse propreté. — Tous les cultes sont également protégés en Hollande : le Calvinisme est la religion la plus 3 répandue; viennent ensuite les Luthériens, les Catholiques, les Mennonites, les Remontrants, les Juifs. — Le gouvernement est une monarchie constitutionnelle, héréditaire pour les deux sexes. Le roi exerce le pouvoir exécutif et partage le pouvoir législatif avec les États généraux, qui se composent de deux chambres. Le gouvernement des colonies appartient exclusivement au roi. Chaque province a ses États particuliers composés de membres élus dans les trois ordres de l’État (l'ordre équestre ou des nobles, l'ordre des villes et l'ordre des campagnes). Le duché de Luxembourg a une administration à part.

Histoire. La Hollande, dont le nom signifie pays creux, était désignée par les Romains sous le nom d'île des Bataves. Elle fut longtemps inhabitable : les eaux couvraient sa surface six mois de l'année; le reste du temps d'humides forêts en rendaient le séjour insalubre. Cependant les Bataves, que l'on regarde comme la plus ancienne tribu établie dans ces pays, formaient déjà une colonie considérable au temps de César; ce conquérant fit avec eux un traité d'alliance lorsqu'il entreprit de soumettre la Gaule belgique (54 av. J.-C.). Sous Tibère, Drusus s'empara de leur pays. Après la mort de Néron, ils se soulevèrent sous la conduite de Civilis (09-71) : ils furent vaincus par Céréalis, mais ils restèrent de fait indépendants. Trois peuplades distinctes occupaient alors la Hollande : les Bataves, les Frisons et les Bructères. Après la dissolution de l'empire romain ils passèrent sous le joug des Francs. Charles Martel fit la guerre aux Frisons, qui s'étaient séparés des Francs sous les derniers Mérovingiens, et remporta sur eux en 736 une victoire sanglante. Charlemagne leur imposa le Christianisme. Sous les faibles successeurs de ce prince, la Hollande se partagea en plusieurs États, gouvernés par des souverains indépendants. Tels furent : les comtes de Hollande proprement dite (depuis 863), les ducs de Gueldre, les seigneurs de Frise et de Brabant, les évêques d'Utrecht, etc. En 1433, Philippe de Bourgogne réunit cette contrée à ses vastes domaines en se la faisant céder par Jacqueline de Bavière, sa cousine, héritière de la Hollande et du Brabant ; il en confia le gouvernement à des lieutenants ou stathouders (elle portait alors le nom de Pays-Bas). Après la mort de Charles le Téméraire (1477), sa fille Marie de Bourgogne porta cet héritage dans la maison d'Autriche, et, après Charles-Quint, il devint la propriété de la branche espagnole de la même maison. C'est à cette époque que se développèrent dans la Hollande le commerce et l'industrie, que favorisèrent surtout la découverte du Nouveau-Monde et celle du passage aux Grandes-Indes. Dès 1523 la réforme de Luther s'établit en Hollande : elle y fit de rapides progrès. Sous le stathoudérat de Guillaume d'Orange (1559), les principaux seigneurs, alarmés de l'influence du cardinal de Granvelle, ministre de Marguerite, duchesse de Parme, et sœur de Philippe II, que ce prince avait nommée gouvernante des Pays-Bas (1559), et craignant pour leur patrie l'effet des rigueurs de l'Inquisition, déclarèrent ouvertement leur opposition aux édits rendus contre la Réforme et en demandèrent le rappel (1564). Repoussés dans leurs demandes, ils s'associèrent pour résister : on les connaît sous le nom ironique de Gueux (V. ce mot). L'arrivée du duc d'Albe (1567), envoyé par Philippe II pour remplacer la gouvernante Marguerite, l'organisation du Conseil de troubles, que l'on a appelé le Tribunal de sang, qui fit, dit-on, périr plus de 18 000 individus dans l'espace de trois années, excitèrent un soulèvement général contre l'autorité espagnole; et Guillaume d'Orange parvint, après une lutte héroïque, à affranchir sa patrie. Par l'Union d'Utrecht (1579), un nouveau gouvernement fut établi sous le nom de République des Sept-Provinces-Unies. Ces sept prov. étaient celles de Hollande, de Zélande, de Gueldre, d'Utrecht, de Frise, d'Over-Yssel et de Groningue. Guillaume d'Orange fut mis à la tête du nouvel État avec le titre de stathouder, son autorité demeurant toutefois balancée par celle des États généraux. Assassiné en 1584 par un fanatique, il fut remplacé par Maurice de Nassau. Sous la conduite de celui-ci, les Hollandais, secourus par Élisabeth et Henri IV, continuèrent a lutter contre l'Espagne, qui, en