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LE SANGLIER

prouver son droit par un champion, elle le fasse, et tous les bons chevaliers du monde sont en la maison du roi Artus. Il est bien préférable d’achever la chose par trahison, car ici plus vaut ruse que force.

La dame ayant consenti, Bertolai fit monter à cheval quelques-uns de ses hommes et il les mena au lieu le plus sauvage de la terre, au cœur de la forêt de Carduel. Puis il envoya un messager au roi Artus qui s’hébergeait alors dans la ville. Et le valet entra dans la salle où le roi était, et, après l’avoir salué, il dit :

— Roi, il y a dans cette forêt le plus grand sanglier qu’on ait jamais vu. Il est si fier et si orgueilleux que nul n’ose l’attaquer dans sa bauge ; cependant il détruit tout. Ceux du pays m’envoient pour vous prier de les en délivrer. Si vous voulez, je vous mènerai au lieu où il gîte.

À cette nouvelle, le roi et ses chevaliers furent très contents. Ils montèrent à cheval aussitôt et se rendirent dans la forêt. Mais, quand ils approchèrent de l’embuscade, le valet dit au roi :

— Sire, le porc est près d’ici ; ces chevaliers sont trop nombreux pour ne point faire de bruit, et je crains que nous ne le perdions.

Le roi fit arrêter ses gens et prenant, outre un épieu, son arc et ses flèches, il s’enfonça dans le bois derrière le valet sans emmener avec lui plus de deux veneurs. Tout à coup, il se vit environné d’hommes armés, et saisi par les bras