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GALEHAUT SIRE DES ÎLES LOINTAINES

et le corps et parut au delà de l’échine : ainsi tomba le premier champion et ses armes sonnèrent, et jamais on ne le vit plus remuer ni main ni pied.

Les gardes du camp accoururent, et quand ils l’eurent vu tué, ils firent sonner du cor à nouveau, et le second chevalier s’élança. Mais au premier choc il vola par-dessus la croupe de son destrier. Durant qu’il se relevait, Lancelot fut poser sa lance contre un arbre ; puis il revint au galop, l’épée à la main. Et quand l’autre le vit accourir ainsi, il eut grand’peur. Mais Lancelot lui cria :

— N’ayez crainte, sire chevalier, car jamais on ne me reprochera d’avoir requis à cheval un homme à pied.

Ce disant, il descendit, attacha son destrier à un arbre, ôta de son cou la courroie de son écu, et, courant sus à son ennemi, il le chargea de tant de coups forts et pressés, que l’autre, blessé en treize endroits, le front ouvert, aveuglé par le sang qui lui coulait dans les yeux, cria bientôt merci.

— Tu auras merci comme l’a eue ton compagnon ! cria Lancelot.

Ce disant, il lui fendit la tête. Puis, essuyant sa lame souillée de sang et de cervelle :

— Ha, bonne épée, dit-il, comme il doit avoir un cœur de prud’homme, celui qui vous porte !

Il revint à son cheval, le détacha, se remit