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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

À la vesprée il en sortait
Quand le temps d’héberger venait ;
Il couchait chez de pauvres gens,
Toujours pensif, toujours dolent…
Un soir, il les ouït parler :
« Tous les barons sont appelés ;
À Tintagel ils vont venir :
Le roi Marc veut sa cour tenir.
Joie et déduit moult y aura,
Et la reine Iseut y sera. »
Le jour que doit passer le roi,
Tristan se hâte par le bois.
Il s’est caché près du chemin
Que suivra la reine, au matin.
D’un coudrier coupe une branche,
Il l’équarrit, l’écorce tranche,
Puis, ayant paré ce bâton,
Il y marque au couteau son nom…
Quand la reine l’apercevra
Le signe elle reconnaîtra.
Il dit que Tristan est venu,
Qu’il a bien longtemps attendu
Pour épier et pour savoir
Comment il la pourrait revoir ;
Qu’il ne saurait vivre sans elle ;
Qu’il en sera de lui et d’elle
Tout ainsi que du chèvrefeuille
Qui noue au coudrier sa feuille.
Lorsqu’autour du bois il s’est mis
Et qu’il s’y est lacé et pris,