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LE TOURNOI DE POMEGLAY

joueurs de vielle et de harpe, les montreurs de lions, d’ours, de léopards et de sangliers. L’histoire dit que jamais il n’y eut une plus belle fête.

Lancelot se logea comme il put, dans une maison si pauvre que nul n’en avait voulu. Il suspendit son écu à la porte, et, comme il était fort las, il s’étendit, tout désarmé, sur un méchant lit couvert d’un gros drap de chanvre et d’une mauvaise couette. Un garnement, un héraut d’armes qui avait mis en gage à la taverne sa cotte et ses chaussures, vint à passer et, voulant savoir à qui appartenait l’écu accroché au dehors, il poussa l’huis tout doucement et approcha sans bruit, sur ses pieds nus, du chevalier endormi. Or, dès qu’il le vit, il reconnut Lancelot et se signa ; mais celui-ci s’éveilla sur ces entrefaites.

— Si tu dis mon nom à quiconque, s’écria-t-il irrité, je te tords le cou !

— Sire, je ne ferai rien dont vous puissiez me savoir mauvais gré ! répondit l’autre.

Mais, à peine hors de la maison, voilà le drôle qui va criant de toute sa voix :

— Ores est venu qui l’aunera ! Ores est venu qui l’aunera !

Les bonnes gens ébahis, sur le pas des portes, se demandaient ce qu’il disait et quel était ce chevalier qui était venu et qui l’emporterait sur tous, car on ne connaissait pas encore ce cri-là ;