Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/154

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ne fit que s’accroître. Un jour le duc d’Orléans se trouvait à Londres, dans l’atelier de l’horloger Arnold, connu dans toute l’Europe, et renommé comme le premier dans son art. Le prince tira sa montre, et, la montrant à Arnold, lui demanda ce qu’il en pensait.

L’horloger, après l’avoir ouverte et examinée avec grande attention, non sans témoigner plusieurs fois de son étonnement, la rendit au visiteur en disant :

— Vous avez là, monseigneur, un chef-d’œuvre, et ce Breguet est, dans notre partie, un maître, mais un maître qu’au plus tôt je veux connaître, et dont il me tarde de serrer la main. » En effet, laissant là son atelier et ses travaux commencés, et, embrassant sa famille, Arnold s’embarqua pour le continent, et quelques jours après, il arrivait à Paris.

Un matin, Breguet, averti par la sonnerie du timbre, voit entrer dans son atelier un étranger qui, le sourire aux lèvres et la main tendue, lui dit :

— Mon cher confrère, j’ai vu tout récemment à Londres, dans la main d’une altesse française, une montre fabriquée par vous et que j’ai admirée comme un chef-d’œuvre. Aussi ai-je passé le détroit tout exprès pour faire votre connaissance et vous adresser moi-même mes félicitations ; je suis Arnold, de Londres.

Qu’on juge de la stupéfaction comme de la joie de Breguet à cette visite si inattendue pour lui, car, même au temps de ses plus grandes prospérités, il était resté fort modeste.

« Malgré tant de titres incontestables à la gloire et à la renommée, cet homme éminemment moral, qui rendait justice à tous, excepté à lui-même, jusqu’à s’étonner