Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/342

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus paternel des sourires. Au milieu d’eux il oubliait ses hauteurs, son amer dédain des hommes qui paraît avoir eu sa principale source dans ce désenchantement résultant de l’expérience, et aussi et davantage peut-être, dans ce triste scepticisme, dans cette misérable incrédulité, alors comme aujourd’hui trop peu rare chez des praticiens même éminents et qui n’en reste pas moins pour nous une aberration incompréhensible. Car, quoi ! ne devraient-ils pas avoir toujours présente à l’esprit cette magnifique profession de foi de l’un des plus illustres patriarches de la science, qui, encore armé du scalpel, devant un cadavre dont le thorax et les flancs étaient ouverts, après avoir fait en quelque sorte toucher du doigt à ses nombreux élèves les merveilles de l’organisme, ne pouvait s’empêcher de s’écrier dans un élan de religieux enthousiasme :

« Ô Éternel, quel hymne je viens de chanter à ta gloire ! »

Il ne pensait pas autrement, le savant Ambroise Paré, quand il disait à propos du duc de Guise, je crois : « Je le pansai, Dieu le guérit. »

On a peine vraiment à comprendre le médecin, le chirurgien, sceptique, impie, ou seulement indifférent, à moins que ce ne soit par un prodigieux aveuglement, suite de passions viles, ou de préjugés grossiers inculqués par cette première et inepte éducation qu’on reçoit trop souvent dans les colléges, les facultés, les cliniques et qui ne pouvait qu’être pire à l’époque où Dupuytren commença ses études, et après les avoir terminées, obtint ses diplômes. L’orgueil, la vanité aidant, et aussi la dévorante activité de cette vie qui ne permet guère le