Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/241

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après avoir parcouru les ateliers, examiné de près les métiers et leurs produits, interrogé les ouvriers, se tournant vers le grand manufacturier, le félicita dans les termes les plus chaleureux ; puis détachant sa propre croix et l’attachant à la boutonnière d’Oberkampf, il lui dit :

« Personne n’est plus digne que vous de la porter, vous et moi, nous faisons la guerre aux Anglais ; vous par votre industrie, et moi par mes armes. » Puis il ajouta, par réflexion, ces mots que les événements ont trop justifiés : « C’est encore vous qui faites la meilleure. »

À cette époque, en effet, Oberkampf, faisant à l’Angleterre une rude concurrence, commençait à exécuter le dessein, par lui conçu depuis longtemps, de diminuer le prix de la main d’œuvre en diminuant le nombre des bras employés pour filer et tisser le coton, et il y réussit en dérobant à nos voisins d’Outre-Manche les secrets de leur fabrication, et en important, comme avait fait Richard Lenoir, les machines dont ils faisaient un si utile usage. De la manufacture d’Essonne, la première de ce genre en France, sortirent bientôt des milliers de pièces de toiles peintes, dans lesquelles s’étaient transformés les ballots de coton brut. Disons en passant, après Rabbe, que cette dénomination de toiles peintes qu’on donne aux produits de ce genre d’industrie ne lui convient pas en réalité ; les perses et les indiennes, qui ont servi de modèles, étaient réellement peintes ; ou n’imprimait que le trait et les sujets étaient coloriés au pinceau, tandis que nos toiles entièrement imprimées ne sont en effet que des toiles teintes ; mais l’ancien nom a prévalu et est resté dans le commerce.