Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/386

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insiste, moins dans son intérêt que dans celui du pays et de nombreux ouvriers aujourd’hui dans la misère et auxquels la nouvelle industrie va donner du travail et du pain.

— Je vous l’ai dit, c’est impossible, ce local a sa destination.

— Mais, monsieur le Préfet, considérez…

— Cela ne sera pas, ne peut pas être ! reprend d’un ton bref et non sans quelque air de hauteur le fonctionnaire.

— Il me faut pourtant cet édifice ! répond sur le même ton Richard ; avant deux heures, j’en aurai pris possession, fût-ce malgré vous, monsieur le Préfet.

En effet, il sort, rentre chez lui au plus vite, et réunissant tous ses ouvriers, il fait enfoncer les portes, détruire les cellules, monter les métiers et il installe militairement ses ouvriers dans l’ancien couvent des Ternelles, pris d’assaut en quelque sorte. Le procédé était vif, car le Premier Consul, pas plus que l’Empereur plus tard, n’aimait qu’on se jouât à l’autorité de ses agents. Mais grâce à l’intervention de Joséphine, que Richard connaissait et qu’il avait eu soin de prévenir, Bonaparte, très-bien disposé au fond pour le fabricant, s’interposa entre lui et le préfet de la Seine, et couvrit d’un bill d’indemnité ce 18 brumaire industriel ! Si je ne me trompe même, les deux bâtiments devinrent, à des conditions toutes léonines, la propriété de Richard, qui vers le même temps fit acheter à son ami Lenoir le magnifique domaine de Malaifre, confisqué en vertu de la loi contre les émigrés. En peu d’années, la fabrication des tissus prit de tels développements qu’il fallut