Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/390

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

défense de Paris (1814), une très-jolie et très-curieuse anecdote :

« Les boulets et les biscaïens pleuvaient dans mon jardin. Au milieu de ces tristes et sanglantes affaires, je me rappelle une bonne plaisanterie de mon jardinier. Cet homme habitait un petit pavillon au bout du jardin ; il s’était réfugié à la maison, mais il ne cessait de se lamenter sur la perte de son trésor qu’il avait laissé dans sa chambre.

— Allez le chercher, dit la cuisinière ; il est encore temps.

— Merci, je n’ai pas envie de me faire tuer. Voyez les balles et les boulets qui brisent les arbres et qui pleuvent sur ce jardin. »

— Eh bien ! prenez un parapluie si vous avez peur.

— En effet, je suis une bête.

« Il se mit effectivement en sûreté sous le taffetas d’un parapluie, et ainsi protégé, il fit deux fois le trajet au milieu des projectiles enflammés sans être atteint. »

Les biographes contemporains, selon leur habitude, nous disent, sans autres détails, que Richard-Lenoir mourut, à l’âge de 78 ans, en octobre 1839. On peut croire, on peut espérer que sa générosité, disons mieux, sa charité, dont nous avons cité de si touchants exemples, lui valut tout au moins le bonheur d’une mort chrétienne. Son convoi fut modeste, mais à défaut de pompe extérieure, la foule ne manquait point au cortège, composé surtout de milliers d’ouvriers qui gardaient pieusement le souvenir du grand industriel,