Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/182

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mais c’est du jour où l’on est sur le chemin de la dureté du cœur que l’on pense ainsi. À côté de ce coffret gisaient deux objets qu’Hubert avait jetés là, le soir même du jour où il avait appris la trahison de sa maîtresse : l’un était sa bague, l’autre une fine chaîne d’or à laquelle était suspendue une clef toute mince. Il prit dans sa main le petit anneau et regarda malgré lui la surface intérieure. Thérèse y avait fait graver une étoile et la date de leur séjour à Folkestone. Ce simple signe évoqua soudain devant Hubert une perspective indéfinie de réminiscences : il revit la porte de l’hôtel, l’escalier et son tapis rouge, le salon où ils avaient dîné, le garçon qui les servait, avec son visage d’une respectabilité britannique, sa lèvre rasée, son menton trop long. Il l’entendit qui disait : « I beg your pardon ; » et à travers ces détails si insignifiants en eux-mêmes, pour lui uniques, le sourire de Thérèse lui apparut. Quelle langueur flottait dans ses yeux alors, ces yeux dont la nuance d’un gris vert était toute fondue, toute noyée d’un complet abandonnement de l’être intime ; ces yeux où dormait un sommeil qui semblait l’inviter à en être le rêve ! Hubert passa la bague à son doigt machinalement, puis il la lança presque avec colère dans le tiroir, contre le bois duquel le métal rebondit. Pour ouvrir le