Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/183

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coffret, il dut manier la chaîne. C’était un jaseron ancien qui lui venait de Thérèse. Il lui avait donné, lui, le bracelet auquel était attachée la clef de l’appartement, et elle lui avait, elle, donné cette chaînette pour qu’il pût porter à son cou la clef du coffret. Il avait gardé ce scapulaire d’amour des mois et des mois, et bien souvent cherché avec la main le petit bijou sous sa chemise, pour se faire un peu de mal en se l’enfonçant contre la poitrine. Il se rappelait ainsi le tendre mystère de son cher bonheur. Que toute cette ivresse était loin aujourd’hui ; ah ! combien loin, combien perdue dans l’abîme du passé, d’où s’échappe une si affreuse odeur de mort ! Quand il eut soulevé le couvercle du coffret, il s’accouda, et, le front dans sa main, il contempla ce qui restait de son bonheur, ces quelques riens si parfaitement indifférents pour tout autre, pour lui si pénétrés d’âme : un mouchoir brodé, un gant, une voilette, un paquet de lettres, un paquet de petites dépêches bleues, mises les unes dans les autres et formant comme un menu livre de tendresse. Et les enveloppes des lettres avaient été ouvertes avec tant de soin, le papier des dépêches déchiré si exactement ! Les moindres détails remémoraient à Hubert les scrupules de piété amoureuse qu’il avait ressentis pour tout ce qui venait de sa maîtresse.