Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/209

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À chaque fois, elle avait soin de demander d’abord : « Monsieur est-il venu ? » et la réponse négative lui rendait l’espoir que le hasard ferait coïncider la visite du jeune homme avec la sienne. Elle épiait le plus léger bruit, le cœur battant. L’ombre noyait autour d’elle les objets que la flambée du foyer ne colorait pas. L’appartement était parfumé de l’exhalaison des fleurs dont elle parait elle-même les vases et les coupes, et, tour à tour, elle redoutait, elle souhaitait l’entrée d’Hubert. Lui pardonnerait-il ? La repousserait-il ? Et enfin elle devait quitter cet asile de son suprême espoir, et elle s’en allait, la voilette baissée, l’âme noyée de la même tristesse que jadis, lorsqu’elle sentait encore les baisers d’Hubert sur ses lèvres, épouvantée et consolée au même moment par cette idée : « Quand le reverrai-je ?… Sera-ce demain ? .. » Un après-midi qu’elle était ainsi étendue sur le divan et abîmée parmi ses songes, il lui sembla entendre qu’une clef tournait dans la serrure de la porte d’entrée. Elle se redressa soudain avec une palpitation affolée du cœur… Oui, la porte s’ouvrait, se refermait. Un pas résonnait dans l’antichambre. Une main ouvrait la seconde porte. Elle se renversa de nouveau sur les coussins du divan, incapable de supporter l’approche de ce qu’elle