Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/128

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Remplissez vous-même les et cœtera. D’ordinaire aussi, ce n’est pas d’un seul cornac que la jolie femme doit subir le patronage, c’est de deux, de trois, de quatre, qui se surveillent et se jalousent, comme s’ils étaient de véritables amoureux, tandis qu’ils sont simplement, tantôt de froids calculateurs, tantôt d’inoffensifs et comiques snobs, d’une espèce si particulière qu’à elle seule elle vaudrait un crayon. Ce n’est point ici le lieu de le tracer. Pour caractériser, aux yeux des lecteurs qui connaissent les masques de la comédie parisienne, la catégorie à laquelle appartenait le découvreur de la « belle Mme Le Prieux », il suffira de nommer le personnage. Ce fut Crucé, le célèbre collectionneur, cet adroit sexagénaire qui, ruiné depuis plus de trente ans, se fait les rentes d’une vie très chère, à brocanter les objets d’art de son musée, indéfiniment et mystérieusement renouvelé. Il avait été, à ce titre, un des premiers à fréquenter autrefois l’hôtel Duret, puis, au même titre, un des premiers à oublier que le spéculateur suicide, fourni par ses soins de quelques précieux bibelots à demi faux, — c’est sa spécialité, — laissait derrière lui une femme et une fille. Mais, retrouvant cette fille belle de cette beauté souveraine, la mémoire lui revint, d’autant plus vite que Mathilde était mariée à un des gros seigneurs de la presse, et, dès lors. Crucé se ménageait des réclames pour une grande vente possible. Il a, d’ailleurs, exécuté ce projet depuis, on se rappelle avec quel entregent et quel succès ! Le vieux boulevardier s’était fait représenter à