Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/338

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Non, docteur, je ne l’ai pas volée… Je ne l’ai pas volée… » — « Tu ne l’as pas volée, » dit le médecin en faisant signe à mon oncle de ne pas m’interroger : « alors qu’as-tu fait ? Voyons, dis-nous toute la vérité !… » — « A son âge ! Une pareille perversité ! Est-ce possible ? Est-ce possible ?… » gémissait mon oncle, tandis que je confessais, à travers mes hoquets, toute ma folie, — tout ce que j’en savais du moins, — et comment j’avais été jaloux d’Octave, et pourquoi que n’avais pas pu supporter d’aller entendre la proclamation du prix d’excellence, et ma crise quand j’avais vu le bijou d’or, et le reste… — « Ne le grondez pas, » dit doucement le médecin, lorsque j’eus achevé ce récit de ma honte et de mes remords,… « il vient d’être assez puni. Et puis il a eu le courage d’avouer. C’est bien, c’est très bien, cela… D’ailleurs tout est réparé… Oui, » ajouta-t-il en tirant un petit paquet de son autre poche, « je l’ai retrouvée, moi, cette montre, et demain elle sera réexpédiée à son légitime propriétaire, qui ne saura jamais, ni qui la lui aura prise, ni qui la lui aura rendue. » Il nous fit voir un bijou, de tout point pareil à l’autre, qu’il avait acheté chez l’horloger : « Le père Courault ne nous trahira pas… N’en parlons donc plus… Mais j’exige de toi une promesse, » dit-il en mettant sa grande main sur ma tête et avec une étrange solennité : « tu vas prendre ce petit bronze, et me jurer que tu ne t’en sépareras jamais… Cache-le dans un tiroir de ta