Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/140

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encore, plus spontané, plus irrésistible. Et puis, montrer aussitôt combien cet interrogatoire de son beau-frère la bouleversait, c’était, pour Agathe, avouer ses propres sentiments. C’était dire qu’elle aimait et qui elle aimait. C’était manquer à cette surveillance de soi, poussée chez elle, depuis tant d’années, jusqu’à la roideur, en particulier dans ses relations avec le mari de sa sœur cadette. C’était enfin risquer de ne pas apprendre ce qu’elle désirait savoir, maintenant, à n’importe quel prix. Un autre instinct, celui de ruse et de diplomatie, toujours éveillé chez les femmes les plus violemment emportées par la passion, lui fit trouver sur place un moyen sûr d’arracher son secret à cet homme, impatient, lui aussi, de savoir. Il allait lui dire toutes ses raisons d’être jaloux.

– « C’est à mon tour de vous supplier de vous calmer, mon cher François, » répondit-elle. « Oui, calmez-vous. Il le faut. Je le veux… Vous me voyez stupéfiée de ce que j’apprends… En premier lieu, que vous croyez avoir quelque chose à vous reprocher dans votre attitude vis-à-vis de moi ?… Je vous répète que je vous ai toujours trouvé si bon, si affectueux, et ce ne sont pas des formules de courtoisie, je vous le jure. Mais nous reviendrons là-dessus un autre jour… J’arrive tout de suite au second point, le plus important, puisqu’il paraît vous bouleverser, à ces assiduités de M. Brissonnet