Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/44

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lui eût expliqué la subite volte-face que résumait ce nouveau petit discours. Ce dérobement devant la présentation possible de l’inconnu, qu’était-ce qu’un frisson de crainte nerveuse ? Et que signifie un inconscient et irrésistible mouvement de cet ordre à l’occasion d’un étranger, sinon un obscur commencement d’intérêt ? Madeleine eût pu s’en convaincre au plaisir singulier que lui causa, quelques minutes plus tard, la preuve, tout d’un coup surprise, de la délicatesse de l’inconnu au contraire et de sa correction. En s’échappant de la salle à manger par la porte du parc, elle croyait ainsi rentrer tranquille. Elle avait compté sans une autre indiscrétion et plus certaine que celle du jeune homme si sévèrement jugé par Mme de Méris. Faut-il dire qu’il s’agissait de Favelles ? Le baron n’était pas de ceux qui perdent une seule occasion de briller auprès d’une jolie femme, ne fût-ce que par le reflet d’un autre. Il avait, tout en passant et repassant dans le promenoir, guetté à travers les vitres la fin du dîner de Mme Liébaut. Il l’avait vue s’attarder une seconde, tandis qu’elle remettait sa pèlerine, comme si elle hésitait sur le chemin à prendre, puis se diriger vers la sortie du parc. Le temps ; pour lui-même, de contourner le bâtiment de l’hôtel, du grand pas de ses vieilles jambes rajeunies par l’importance de l’effet à produire plus encore que par la thermalité mysté