Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/47

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que je lui avais annoncé que vous voudriez bien me laisser vous l’amener. Vous avoir vue, » ajouta le galantin, « et perdre une occasion tout offerte de se rapprocher de vous, c’est invraisemblable !… Enfin, vous m’autoriserez à réparer ce contre-temps demain, si vous êtes dans le parc à l’heure de la musique ? Je lui ai donné rendez-vous là… Pourvu qu’il n’ait pas l’idée de repartir !… Tandis que je le reconduisais à son hôtel, à deux pas, il incriminait les eaux de Ragatz. Il a pris son premier bain aujourd’hui. Quelquefois ce premier bain réveille les misères que la cure va soulager. Je lui ai dit cela, sans parvenir à lui arracher une promesse de prolonger l’expérience. La guigne serait complète. Ah ! s’il s’en va, et quand vous êtes à Ragatz, vous, madame Liébaut, je donne ma démission de colonial. C’est que l’Afrique abêtit les officiers français… De mon temps, il n’y avait pas de névralgie qui tînt. Les belles dames d’abord, la santé ensuite ! J’ai toujours envie de leur dire, comme dans la comédie :

Cédez-moi vos trente ans, si vous n’en faites rien

Brissonnet pourtant est aussi spirituel qu’il est brave, et il cause quand il veut causer !… S’il reste, je lui ferai narrer ses histoires de chasses… Que Mlle Charlotte en entende une, une seule, elle ne voudra pas plus lâcher le commandant