Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/115

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montraient le grain de la trame, — enfin tout un appareil intime dont la jeune fille sentit aussitôt qu’il n’était guère fait pour plaire au poète, car elle empêcha qu’il ne prit le siège que lui indiquait madame Offarel en disant :

— « Monsieur René sera mieux au salon, il fait trop sombre ici… »

Avant que sa mère n’eût pu lui répondre, elle avait déjà poussé le visiteur dans la pièce décorée de ce nom pompeux de salon, et qui, en réalité, servait surtout de cabinet de travail à Angélique. Celle-ci augmentait un peu les ressources de la famille par le produit de quelques traductions de romans anglais. Elle était, en ce moment, assise auprès de la fenêtre, en train d’écrire sur un guéridon. Un dictionnaire traînait à ses pieds, chaussés de pantoufles dont elle avait, pour plus de commodité, écrasé les quartiers. Elle n’eut pas plutôt vu René qu’elle ramassa ses papiers et ses livres. Elle s’échappa, en laissant voir ses cheveux mal peignés, sa robe de chambre au corsage de laquelle manquaient des boutons.

— « Excusez-moi, monsieur René, » disait-elle en riant, « je suis faite comme une horreur et je ne peux pas me montrer. »

Le jeune homme s’était assis et il regardait la pièce, de lui bien connue, dont la grande élé