Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/313

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avait négligé jusqu’aux plus élémentaires devoirs de la politesse. Non seulement il n’avait pas mis de cartes chez les diverses femmes qui l’avaient si gracieusement prié, mais il n’était même pas retourné chez la comtesse. Cette dernière, assez grande dame et assez bonne personne à la fois pour comprendre la nature irrégulière des artistes, et pour leur pardonner ces irrégularités, s’était dit : « Il s’est ennuyé chez moi… » et elle ne l’avait plus invité, sans lui en vouloir. Elle était d’ailleurs en train, pour l’instant, d’imposer à sa société un pianiste russe et spirite qui se prétendait en communication directe avec l’âme de Chopin. René, qui se trouvait tranquille de ce côté, eut encore la chance que madame Offarel se froissât de ce qu’ils n’avaient pas assisté, Émilie et lui, au fameux dîner préparé une semaine durant, à grand renfort de courses à travers Paris. Fresneau s’y était rendu seul.

— « En voilà une expédition où tu m’as envoyé ! » avait-il dit à sa femme en revenant. « Quand j’ai parlé de ta migraine, la vieille Offarel a fait un ah ! qui m’a coupé bras et jambes. Quand je lui ai raconté que René se trouvait absent, auprès d’un ami malade, — quelle drôle d’excuse, entre parenthèses, mais passons ! …— elle m’a demandé : — Est-ce dans