Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/438

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cause possible à une reprise de soupçon assez violente pour aller jusqu’à l’espionnage : le retour de Claude. Elle eut un mouvement de haine contre ce personnage. « Si c’est à lui que je dois cette nouvelle alerte, il me le paiera… » songeait-elle. Mais elle revint aussitôt au danger qui, pour l’instant, lui importait plus que sa rancune contre l’imprudent Larcher. Le fait était là, positif : pour une raison ou pour une autre, René avait surpris le secret de ses rendez-vous avec Desforges, et la douleur avait été si forte que, sur-le-champ, il avait dû la lui crier. Que d’amour dans cette folle démarche à l’Opéra qui avait failli la perdre. Au lieu de lui en vouloir elle l’en chérissait davantage. C’était une preuve de passion, donc un signe de sa puissance sur le jeune homme. Non, un amant qui aime avec cette frénésie n’est pas difficile à ramener. Il fallait seulement qu’elle le vît, qu’elle lui parlât, qu’elle lui expliquât de vive voix cette visite rue du Mont-Thabor. Elle pouvait être allée tout simplement chez une amie malade, qui fût aussi l’amie de Desforges. Mais la voiture renvoyée devant Galignani ? …— Elle avait eu envie de marcher quelques pas. Mais les deux entrées ? …— Tant de maisons honnêtes sont ainsi ! … Elle connaissait trop, par expérience, les côtés confiants du caractère de René pour