Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/493

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qui en avait été l’auteur indirect ? Claude essaya vainement de secouer ce remords en se disant ! « Pouvais-je prévoir ce malheur ? … » Il l’avait prévu, cependant. Il ne pouvait résulter que du mal de cette transplantation subite du poète dans un milieu de luxe, où sa vanité et sa sensualité s’étaient épanouies aussitôt. Le pire était arrivé. Par un affreux hasard, soit. Mais qui avait provoqué ce hasard ? La réponse à cette question était cruelle pour un ami véritable, et ce fut le cœur serré que Claude sonna à la porte de cette maison où régnaient jadis la simplicité, le noble et pur amour, avec le travail. Que de mortels miasmes y avaient pénétré à sa suite et que de tristesses ! Il put le constater une fois de plus au visage décomposé de Françoise, qui vint lui ouvrir, et qui fut prise, à sa vue, d’une crise de sanglots. Elle essuyait ses yeux avec le coin de son tablier bleu, tout en disant dans son langage mêlé de mots de patois :

— « Ah ! I’la faut-i ! … Mon bon monsieur. Vouloir se périr ainsi, un enfant que j’ai connu tout cheti et minaud comme une fille ! … Jésus, Marie, Joseph ! — Entrez, monsieur Claude, vous trouverez madame Fresneau et mademoiselle Rosalie… M. l’abbé Taconet est avec lui qui le console… »