Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/510

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sur une chaise, et il regarda ce défilé, reconnaissant celui-ci, celle-là, et se rappelant les histoires, ou vraies ou fausses, qu’il savait sur chacun ou chacune… Une voiture tout à coup attira son attention parmi les autres. Il ne se trompait pas… Un élégant vis-à-vis approchait, emportant madame Moraines avec Desforges assis à son côté et Paul Moraines en face. Suzanne souriait au baron qui, évidemment, emmenait sa maîtresse et le mari au bois, — sans doute pour y dîner. Elle n’aperçut pas l’ami de René qui, après avoir suivi des yeux longtemps la jolie tête blonde tournée à demi vers le protecteur, se mit à rire et dit tout haut :

— « Quelle comédie que la vie et quelle sottise d’en faire un drame ! » puis il tira sa montre et se leva précipitamment :

— « Six heures et demie, je serai en retard chez Colette… »

Et il héla un fiacre qui passait à vide, pour arriver rue de Rivoli— cinq minutes plus tôt !

Février-Octobre 1887.