Page:Bourget - Une idylle tragique, Plon-Nourrit.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et autour des roses rouges du chapeau dont se coiffaient ses beaux cheveux, blonds, du blond fauve cher aux peintres de son pays. L’éclat voluptueux de son teint, la noblesse un peu lourde de son visage aux grands traits, l’épaississement précoce de son buste s’accordaient bien avec son origine, et, surtout, la caresse bleue de son regard, où flottait la langueur passionnée de la lagune. Elle en enveloppait, elle en noyait le causeur qui lui parlait à cette minute et dont elle était visiblement éprise jusqu’à la folie. L’aspect de ce dernier justifiait cette adoration, plus sensuelle que sentimentale. Ce jeune homme, alors dans la pleine maturité de sa force, offrait un type remarquable de cette beauté virile, particulière à notre Provence et qui atteste qu’elle fut, en effet, pendant des siècles, la Province par excellence, la terre choisie où la race Romaine a le plus fortement marqué son empreinte. Ses cheveux noirs, coupés très court sur un front droit et blanc, sa barbe taillée en pointe et un peu frisée, l’arête ferme de son nez et la profondeur de son arcade sourcilière lui donnaient un profil de médaille qui eût été sévère, si toutes les chaudes énergies de l’homme d’amour n’eussent brillé dans ses yeux humides, et toute la gaieté du Midi dans le sourire de ses dents blanches. Son corps robuste et souple se devinait sous l’étoffe mince du king et sous le piqué du gilet blanc. Cette impression de robustesse animale était si évidente, la gesticulation un peu excessive de ce garçon attestait une si complète