Page:Bourget - Une idylle tragique, Plon-Nourrit.djvu/59

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éteinte, les Rodier-Vimal. — Certes à leur naissance, l’une au château de Sallach, au pied des Alpes Styriennes, l’autre rue du Faubourg-Saint-Honoré, à l’hôtel Rodier, il semblait bien que leurs chemins d’ici-bas dussent être à jamais séparés. Un même malheur les avait rapprochées. Voici comment. Toutes deux avaient perdu leur mère à la même époque, et, presque aussitôt, les deux pères s’étaient remariés. Toutes deux avaient eu, dès les premiers mois de ces nouveaux mariages, des difficultés avec leur belle-mère, et pour chacune cette petite crise d’intérieur s’était résolue par l’internement au Sacré-Cœur, à Paris. Le banquier avait choisi cet établissement parce qu’il en administrait les fonds et qu’il en connaissait les supérieures. Le général de Sallach, lui, avait été poussé à ce choix par sa seconde femme, qui, du même coup, se débarrassait de sa belle-fille et se procurait un prétexte pour venir souvent à Paris. Entrées dans la pieuse maison de la rue de Varenne le même jour, les deux orphelines, la jeune Autrichienne et la jeune Française, avaient éprouvé l’une pour l’autre un vif attrait de sympathie. Leurs confidences réciproques avaient vite transformé cet attrait en une amitié passionnée. Puis cette amitié avait duré, parce qu’elle reposait sur les portions profondes de leur caractère, que le temps devait approfondir encore.

La Tragédie classique n’était pas si loin de la nature que l’ont prétendu ses adversaires, quand, à