je m’étais faite de ne pas parler à Monsieur Sureau
de son envoi ; et pris prétexte de l’intérêt qu’il
paraissait y porter pour sortir dignement de la situation
embarrassante où je m’étais engagé. L’effort
que je dus accomplir pour prendre un ton naturel
me fit sentir à quel point la contemplation de cette
image m’avait troublé :
« Ainsi, lui dis-je, vous aviez un sentiment de prédilection
pour la sculpture ?
— Non, dit-il. Mon cœur bat devant tout ce qui
fait de l’ombre ; et bat plus fort devant ce que
son ombre a laissé s’échapper.
Il s’interrompit et, me tirant cette photographie
des mains, repartit clopin-clopant vers la pièce voisine
où il s’assit. Maintenant, l’image était devant
ses yeux, sous une lampe à abat-jour ; et je la
regardais avec lui, tout en examinant furtivement
son visage. Il ne paraissait pas attacher à ce chef-d’œuvre
une attention d’artiste ou d’archéologue ;
mais, la tête légèrement inclinée, comme s’il y avait
eu dans son cœur une voix pour donner un nom
à ce qu’il ne faisait qu’entrevoir, il examinait
l’Apollon en remuant les lèvres et me semblait
faire fi de la beauté que j’y voyais pour respirer
un peu de vie à travers elle et, dans l’apparence
qu’elle affectait, prendre la mesure de son attente