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la terreur en macédoine

sait ainsi pour des motifs qui ne te regardent pas…

« Tu l’as cru et tu as fait brûler vingt-cinq villages… c’est parfait, car cela entrait dans mon plan.

— Tu es un misérable… un assassin… et tu vas payer cher ton infamie… »

À son tour, Marko se met à rire et, parodiant la phrase du vali, s’écrie :

« Mots inutiles… fanfaronnades ridicules, je viens ici en ami, sans armes, pour faire la paix…

— Tu as vraiment trop d’audace !

— Oui, assez… comme un homme sûr de soi et qui représente une fortune suffisante pour acheter pas mal de choses et beaucoup de gens.

— Ah ! tu es riche ?

— Oui, très, riche… opulemment ! Depuis des années, nous thésaurisons, sordidement, de père en fils… nous avons notre trésor de guerre et l’instant est venu d’en user…

— Je ne te comprends pas.

— Tu vas voir… en quelques mots !

« Je suis de vieille et illustre origine… Je descends de ces princes d’Albanie qui furent et demeurent au fond les maîtres du pays… Je suis en outre bon musulman, et non pas un de ces hypocrites, demeurés, selon leurs intérêts du moment, à la fois partisans du Christ et sectateurs d’Allah. Or, si la conquête turque a brisé notre unité nationale, elle n’a pu enlever à l’Albanie son caractère, ses coutumes, sa cohésion. Elle a morcelé notre sol, mais elle n’a pas modifié nos âmes. »

Patiemment, le vali écoute cette longue tirade et semble se demander :

« Où diable veut-il en venir ? »