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la terreur en macédoine

heureux poussent des hurlements et se débattent.

« Allons !… confesse Allah ou confesse le Christ !… »

Le boucher, un Turc énorme, le ventre caché par un tablier plein de sang, allonge sa tête coiffée du tarbouch et s’écrie, flairant le massacre :

« Des giaours !… ce sont des giaours !

— Eh bien ! oui… nous sommes chrétiens…

— Ah ! ah !… des infidèles… tue !… tue !… à mort !… à mort !… »

On les empoigne, on les entraîne dans la boutique. Puis, brutalement, on les allonge sur l’étal…

« Des couperets !… des couteaux !… voilà des couperets… et fraîchement affûtés… voilà des couteaux… de vrais damas ! »

Boûm !… boûm !… et boum !… les couperets levés à tour de bras retombent, avec un fracas d’os éclatés qui se mêle au bruit d’étal… des clameurs affreuses déchirent l’air…

On coupe les mains… on coupe les pieds…

Le boucher aide les tortionnaires malhabiles et s’écrie :

« Pieds de cochon !… pieds de cochon à vendre[1] !… »

Le sang jaillit partout ; les plaintes deviennent plus terribles s’il est possible et se mêlent à des râles d’agonie.

Des moignons rétractés jaillit toujours la pluie rouge, la pluie de sang aux fades émanations qui vont griser les bandits ! Ils empoignent les victimes

  1. Je tiens à déclarer une fois pour toutes que je ne fais point d’horrible à plaisir. Tous ces faits sont, hélas ! rigoureusement vrais et bien au-dessous de l’effroyable vérité que je suis forcé d’atténuer.