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la terreur en macédoine

L’ancien gendarme répond avec insouciance :

« Bast ! jamais deux obus n’arrivent à la même place !

« J’en sais quelque chose, j’ai été artilleur. »

Avec un mépris inouï du danger, il se dresse de toute sa hauteur, comme pour braver.

« Prends garde ! lui crie Joannès.

— As pas peur, mon capitaine !

« Ça me connaît, vois-tu… car je… »

Il n’achève pas la phrase. Avec sa vitesse foudroyante, un obus arrive… passe… et lui enlève la tête !

Son grand corps décapité demeure un moment debout, rigide, crispé !… Il oscille, penche et s’abat tout d’une pièce.

Un cri d’horreur échappe à ses compagnons éclaboussés par le sang et les débris… Oh ! les affreux débris.

« Mourad !… pauvre Mourad ! » sanglote Nikéa.

Un nouveau projectile suit aussitôt. Il s’écrase sur les pavés qui murent la porte et jaillit en une grêle de fer.

La maison tremble jusque dans ses fondations. La fumée monte, blanchâtre, opaque, suffocante.

Au loin retentissent des cris d’une allégresse féroce, des hurlements de démons. Les égorgeurs applaudissent bruyamment à l’adresse des canonniers.

À présent, les obus se succèdent avec une vitesse et une précision terribles.

Les uns rasent les murailles avec leur crissement de mort.

Les autres éclatent sur les pierres avec leur fracas de tonnerre, lézardent les pans, fouillent et désarti-