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la terreur en macédoine

« Excellence, nous sommes à bonne portée… on pourrait faire tirer… je vous garantis que nous tuerions tout !

— Gardez-vous-en bien !… je défends de faire feu… Malheureusement je connais l’endroit et je me défie des cadavres qui s’en vont au fil de l’eau !

— La rivière est profonde et pas un n’échapperait.

— Tu es une brute ! Celui qui conduit cette petite troupe en est sorti, pieds et poings liés, à mon nez, à ma barbe !

« Comprends-tu, maintenant ? »

Tout en dialoguant d’une façon plutôt vive, ils se sont immergés à leur tour, Marko en tête, et toujours flanqué de son léopard.

Déjà le peloton des fugitifs, sorti tout ruisselant de la rivière, a repris son galop furieux. Rafraîchis et reposés, les chevaux filent comme le vent qui apporte les dernières paroles du pacha. Tout d’abord, ils gagnent de vitesse et augmentent notablement la distance qui sépare les deux troupes.

Cela ne semble guère émouvoir Marko. Il s’anime à cette chasse passionnante et semble d’ailleurs certain du succès. Son lucerdal bondit près de lui avec sa légèreté de fauve, excité, lui aussi, en vraie bête sanguinaire, par la pensée de la curée prochaine.

Du reste, il y a là deux cents hommes, les meilleurs cavaliers du corps d’armée, quoi que Marko ait pu dire au passage de la rivière. Pleins d’expérience, connaissant admirablement le cheval, ils savent obtenir de lui la plus grande somme de vitesse, avec le minimum de fatigue. Tout à coup, Marko s’aperçoit que les fugitifs obliquent, à droite, comme s’ils voulaient gagner la plaine.