les raisons de se défier au moment où l’idée prend naissance, c’est-à-dire reçoit un nom qui la distingue. Ce vice originel commencerait avec la pensée et y serait inclus pour ainsi dire. Il faut, pour s’en rendre compte, remarquer que nous ne pensons qu’avec des mots, et que les défauts du langage deviennent ceux de la pensée elle-même. Or quels sont les défauts du langage ? en d’autres termes, par quoi les mots sont-ils impropres à devenir les signes adéquats de la réalité extérieure ? Cette réalité est complexe, or l’intellect ne saisit les choses qu’en les simplifiant ; la réalité est simultanée, l’intellect prend un élément après l’autre, et s’achemine péniblement vers une totalité qu’il ne réalise jamais ; la réalité est continue, or l’intellect procède par éléments discontinus, il les conçoit, non comme des fragments qui attendent leur complément, mais comme des touts, dont la figure est régulière et fermée la réalité est concrète, et nous donne une sensation d’une seule venue, l’intellect ne la connaît que par des abstractions dont chacune est le signe d’une perception extérieure distincte, et dont la réunion, si riche et si ample qu’on la
