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plin d’où il s’élance dans l’ontologie, dans le système de la raison impersonnelle. L’influence écossaise est-elle donc décidément dominée par l’influence allemande ? N’aura-t-elle servi qu’à ménager une transition entre deux développements contraires ?


III

Dans le temps même où Victor Cousin s’éloignait de plus en plus de Reid pour aller rejoindre, à travers Kant et Fichte, Platon et même Plotin, son disciple Jouffroy, qui depuis 1819 enseignait la philosophie à l’École normale, et qui, après 1822, l’ÉcoIe ayant été fermée par la contre-révolution, avait continué ses cours chez lui pour une jeunesse d’élite, jugea utile de revenir purement et simplement à la méthode de Reid. Ce fut comme un second appel à l’action bienfaisante de la philosophie écossaise.

Les inquiétudes de Jouffroy n’avaient pas pour unique cause sa timidité en métaphysique. Le matérialisme, qu’on avait cru surmonté avec l’idéologie condillacienne, reparaissait, plus précis et plus déclaré, dans les écrits des physiologistes et des médecins. Magendie enseignait que, selon les exigences de la méthode scientifique, on devait désormais traiter de l’intelligence humaine comme si elle était le produit d’un organe du corps. Il soutenait que les idées qui nous viennent du dehors sont plus nettes de leur nature que