Page:Boutroux - De l’idee de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines.djvu/114

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Cette activité consiste à s’analyser elle-même, et, par là, à se diversifier, à se transformer en facultés plus spéciales et plus hautes. Mais le plus grand représentant de l’analyse est Kant. Pour lui, il est impossible d’expliquer le jugement d’existence impliqué dans toute expérience, si l’on n’admet une action de l’esprit. Cette action se trouve donc, malgré qu’on en ait, au fond de tout ce qu’on dit être donné. Le donné pur et simple est une chimère. Il n’y a de donné que ce que l’esprit se donne en s’assimilant les matériaux fournis par le dehors. Ainsi s’est formée, par l’emploi de la méthode analytique, la doctrine dite des facultés.

Par une autre voie, à savoir par l’observation intérieure poursuivie aussi avant que possible, les Ecossais arrivent à des résultats analogues. Dans les perceptions externes, où Locke voyait des idées simples, Reid démêle, par introspection, trois éléments : la sensation, la conception d’un objet extérieur dont la sensation est le signe, et la croyance immédiate à l’existence actuelle de cet objet. Or, cette croyance est un jugement primitif formé en vertu de lois psychiques fondamentales, dites principes du sens commun. A la suite de Reid, Jouffroy croit apercevoir, sous les phénomènes, les facultés qui y président et, sous les facultés, la substance même qui possède ces facultés. Par l’observation même, il arrive à l’apriorisme. Donc, soit par la méthode d’observation, soit par la méthode d’analyse, on obtient autre chose que des faits. En face de l’associationnisme se dresse l’apriorisme dans le développement même de la philosophie de Locke. Les deux principes qu’avait combinés cette philosophie se sont dissociés et sont entrés en antagonisme. Nous avons vu la psychologie mathématique des carté