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non développables en séries de Taylor[1]. Il y a plus. Du point de vue même des mathématiques pures, une extension nouvelle de la notion de fonction apparaissait nécessaire. On constatait, en effet, qu’il existe des expressions algébriques[2] dépendant d’une variable x — par conséquent, des fonctions définies en termes purement mathématiques — qui ne sont pas développables en séries de Taylor : c’est le cas notamment pour les séries convergentes de sinus et de cosinus connues sous le nom de « séries de Fourier »[3]. Ayant reconnu ce fait, on fut tout d’abord amené à préciser la terminologie jusqu’alors en usage. Sous le nom de fonctions analytiques, on continua d’étudier les fonctions développables en séries de Taylor ; mais on se réserva de donner une suite à la théorie de ces fonctions en abordant plus tard les fonctions non-analytiques.

Et, aussi bien, même dans le domaine restreint des fonctions analytiques, l’insuffisance de la méthode fondée sur les séries ne devait pas tarder à se faire sentir.

Le postulat de cette méthode, est, en effet, que, si l’on veut bien se contenter d’une approximation déterminée à l’avance, on est en droit de remplacer, dans tous les calculs, les séries par des polynomes. Or, supposons que cette condition soit remplie, pour une certaine série, lorsque l’on donne à la variable x certaines valeurs particulières, par exemple des valeurs voisines de zéro.

  1. L’étude systématique des fonctions de cette nature fut inaugurée par Fourier dans sa Théorie analytique de la chaleur, Paris, 1822.
  2. Au sens le plus large du mot « algébrique » ; lorsque ces expressions sont transcendantes, on les appelles d’ordinaire « expressions analytiques ».
  3. Ces séries introduites par Fourier dans l’ouvrage cité ci-dessus avaient déjà été considérées dans des cas particuliers, à partir de 1748, par Euler, Clairaut, Lagrange.