Page:Boutroux - La Monadologie.djvu/158

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dont la structure fasse penser, sentir, avoir perception ; on pourra la concevoir agrandie en conservant les mêmes proportions, en sorte qu’on y puisse entrer, comme dans un moulin. Et cela posé, on ne trouvera en la visitant au dedans, que des pièces, qui poussent les unes les autres, et jamais de quoi expliquer une perception. Ainsi c’est dans la substance simple, et non dans le composé, ou dans la machine qu’il la faut chercher. Aussi n’y a-t-il que cela qu’on puisse trouver dans la substance simple, c’est-à-dire, les perceptions et leurs changements. C’est en cela seul aussi que peuvent consister toutes les Actions internes des substances simples (Préf. ***, 2, b[1]).

18. On pourrait donner le nom d’Entéléchies[2] à

    Erdm., p. 203 a), peut encore moins admettre que la matière soit capable de penser. Cette question se ramène pour lui à celle de savoir si la pensée peut être un mécanisme, c’est-à-dire un simple déplacement de parties, sans intervention d’aucun élément qualitatif, d’aucun principe de distinction. Or, ainsi ramené à son essence, le matérialisme, selon lui, apparaît immédiatement comme insoutenable.

  1. Voy. éd. Erdm., p. 474 a.
  2. Entéléchie, ἐντελέχεια, terme créé par Aristote, et dont l’étymologie est vraisemblablement ἐντελως ἒχειν, c’est-à-dire être à l’état d’achèvement, de perfection. L’entéléchie, chez Aristote, se confond en général avec l’ἐνέργεια, qui est le contraire de la δύναμις. C’est donc l’état d’une chose qui possède actuellement la perfection, la forme, la détermination dont elle était susceptible. Quand Aristote, distingue ἐνέργεια et ἐντελέχεια, il entend par ἐνέργεια l’action ou réalisation, et par ἐντελέχεια l’état de perfection ou la réalité. Il appelle d’ailleurs ἐντελέχεια la perfection produite en un mobile par un moteur étranger, aussi bien que la perfection qu’un être se donne par lui-même (Voy. Phys., III, 3). — Leibnitz détermine à sa manière, et selon l’esprit de son système, le sens du mot entéléchie. La perfection, pour lui, c’est la quantité d’essence la richesse, la multiplicité de détails que renferme une nature. Cette perfection est elle-même, dans les choses, le principe naturel du développement et de l’existence. Les possibles prétendent à l’être proportionnellement à la richesse de détails qu’ils sont capables d’exhiber. Or chaque monade créée, ayant en soi, à l’état