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n’est que la figure de la distance, infiniment plus grande, qui sépare le second du troisième. Avec la connaissance et l’observation de ces rapports rentrent dans l’âme humaine l’harmonie et la paix.

Comme elle nous éclaire sur la religion et sur nous-mêmes, ainsi la foi en Jésus-Christ règle notre conduite. Le digne objet des désirs de l’homme, c’est la possession de la grâce divine. Or il n’y a pas de formule d’incantation qui puisse forcer Dieu à nous la communiquer. C’est l’erreur mortelle des païens et des chrétiens qui pensent en païens, de soumettre Dieu aux actions des hommes. Mais, d’autre part, il ne faut pas croire, avec certains chrétiens, imbus de l’erreur contraire, que Dieu nous sauve sans notre participation, que nos actes sont indifférents, que Jésus-Christ prend purement et simplement notre place devant le tribunal de son père. La vérité, c’est que l’œuvre de la grâce, toute divine dans sa source, est nécessairement accompagnée de l’action humaine. Cette action consiste à prendre part à l’œuvre de salut qui s’est accomplie par la miséricorde divine, à vivre en Jésus-Christ, comme nous avons vécu en Adam. Vivre en Jésus-Christ, c’est être admis à sa gloire en partageant ses souffrances. Il ne nous a pas dispensés de souffrir, puisqu’il est notre modèle et qu’il a souffert. Mais il nous a donné le moyen de rendre nos souffrances fécondes.

La vie chrétienne est ainsi une vie de mortification. La souffrance que nous nous infligeons en communion d’esprit avec Jésus-Christ est notre part dans l’œuvre de notre salut. Par elle nous travail-