Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de plâtre : & pour qu’il s’attachât davantage au marbre, on le fit déchiqueter avec le ciseau en plusieurs endroits. Cinq ou six mois après que la dépense de ces habits avoit été faite, le prince Pamphile vint à mourir. Son fils voulut faire ôter les chemises de plâtre ; mais quelque soin qu’on prît à réparer les maux qu’avoient causés le zele du directeur, il y eut plusieurs statues de mutilées ; & ce moine fit ainsi lui seul autant de mal qu’une armée de Goths & de Vandales.

Je considere souvent combien un homme qui s’abandonne aux conseils pernicieux d’un esprit fanatique, est exposé à faire des choses extraordinaires. Le zele outré du prince Pamphile me rappelle un autre trait arrivé dans ce pays.

Un peintre Italien, nommé Sébastien Couchi, avoit acheté pour un souverain d’Allemagne, deux tableaux de Jules Romain. L’un représentoit l’enlevement des Sabines, & l’autre l’amour & Psyché. Un moine qui dirigeoit sa femme, l’étant allé voir chez elle, eut la curiosité d’examiner les tableaux de son mari. Cette femme le mena dans l’attelier, où malheureusement le peintre ne se trouvoit point alors. A peine ce moine eut-il apperçu les deux tableaux,