Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/306

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Le bon sens, la pénétration, la force du raisonnement, tout s’y rencontre. On devroit élever à un aussi excellent ouvrage philosophique, un temple & un autel. L’on y brûleroit pour victimes, dans certains jours de l’année, la philosophie Thomistique, Scotique, Loyolitique : il n’y auroit pas même de mal que les commentateurs d’Aristote eussent le même sort, & que l’on otât le texte Grec d’une compagnie aussi mauvaise.

Quelle que soit la gloire de l’auteur à qui je veux élever ce temple par la maniere dont ses ouvrages sont écrits, plusieurs personnes ne peuvent en connoître le mérite. Uniquement occupé de plaire aux savans, il n’a point trouvé l’art de traiter les matieres d’une façon brillante & aisée, & de les rendre à la portée de bien des gens, qui ne peuvent goûter un ouvrage dont les idées leur paroissent embrouillées. C’est dans le talent de rendre les choses les plus relevées d’une maniere nette, précise & brillante, que Bayle a excellé. Ses écrits pleins de force, soutenus d’une imagination vive & d’une érudition