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Lettre XXVII.

Aaron Monceca, à Isaac Onis, Rabbin de Constantinople.

Je t’ai écrit dans mes dernieres lettres ce que j’avois remarqué de plus particulier dans le caractere des nobles, des courtisans & des ecclésiastiques. Il me reste à te donner une idée juste du peuple.

Il n’est point esclave de la noblesse dans ce royaume ainsi qu’en Allemagne ; mais aussi n’est-il pas aussi libre qu’en Angleterre. Sa situation est un juste milieu qui les garantit des persécutions d’un nombre de petits tyrans, qui le retient dans de justes bornes, & l’empêche de donner dans les insolences & les brutalités où la populace se laisse si aisément entraîner. Les priviléges trop vastes des Anglois les rendent insupportables. Le peuple, toujours maître de ses volontés, accoutumé à voir tout fléchir sous lui, est sujet à causer des changemens & des catastrophes semblables à celles que produisent les révoltes des janissaires.