Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/322

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Les Romains ont une fierté insupportable, & qui leur attire sans cesse des démêlés avec tous les souverains. La Cour de Rome toujours attentive à s’aggrandir, ne laisse échapper aucune occasion pour arriver à ses fins. Les Génois, loin de vouloir augmenter leur état, ne pensent uniquement qu’à conserver ce qui leur appartient. Sans songer à empiéter sur les droits des autres souverains, ils ne sont occupés que de la conservation des leurs. C’est-là leur unique étude, & à quoi s’attache toute leur politique. Ils sont dans une situation épineuse. La France est pour eux un voisin redoutable qu’en secret ils haïssent beaucoup, étant obligés de dissimuler leurs sentiments. Avant les derniers changements arrivés en Italie, ils regardoient l’empereur comme un soutien contre la France. Quoiqu’ils n’osassent pas favoriser publiquement ses intérêts, il étoit aisé d’appercevoir ce qui se passoit au fond de leur cœur. Depuis la perte du Milanois, ils sont presque devenus esclaves de la France [1].

Dans leur malheur ils ont eu un sort pareil à celui du vieux lion malade : il n’est aucun prince d’Italie qui ne les ait insultés indirectement, &

  1. Cette lettre a été écrite avant la paix de 1736.