Page:Boylesve - Le Parfum des îles Borromées, 1902.djvu/186

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— Je suis doublement anxieux, fit-il en s’efforçant de sourire, d’apprendre une nouvelle intéressante, et un mystère qui serait brisé en ma faveur.

— C’est une plaisanterie, dit Mme  de Chandoyseau.

— Quoi ? vous me mettez l’eau à la bouche, pour…

— Ha ! ha ! ha ! le vilain curieux ! curieux comme une femme ! Fi ! que j’aurais grand’honte !

— Ma confusion est sans bornes, mais je vous écoute, madame.

— Allons ! vous êtes gentil. Je ne devrais rien vous dire, mais je vous parlerai en amie. Ah ! ça, dites-moi : vous êtes donc en froid avec Madame Belvidera ?

— Je ne vous comprends pas, fit-il, en comprimant un mouvement de stupeur.

— Dame ! si vous n’êtes pas en froid, pourquoi a-t-elle lancé à votre arrivée, la phrase que vous avez entendue ?

— Je vous comprends de moins en moins !

— Ah ! vous n’êtes pas fin, aujourd’hui ! J’espérais me faire entendre à demi-mots ; autrement, vous concevez, ce que je vous dis là cesse d’être élégant, cela devient indiscret…

— On m’a annoncé une confidence, madame. Donc, trêve de précautions oratoires ; nous savons l’un comme l’autre, que la discrétion n’est pour rien ici.

— Ah ! vous voyez bien que vous savez ce que parler veut dire ! je vous retrouve là. Eh bien ! vous n’avez pas encore compris ?

— J’avoue…

— Remarquez que c’est vous qui me faites parler ! Vous ne m’en voudrez pas de jouer le rôle d’interprète dans une occasion où je ne devrais vous donner qu’un petit coup de coude amical, comme cela : pan, pan !… tout doucement ; ce qui veut dire simplement : « Voyez donc, voyez donc ! »