Page:Boylesve - Le Parfum des îles Borromées, 1902.djvu/187

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— Mais quoi ? quoi ?

— Mais que madame Belvidera me priait de vous garder, — ce que je fais depuis cinq minutes, — parce que, sans doute, elle ne voulait pas de vous dans sa promenade…

— Quelle promenade ?

— Comment ! vous ne savez pas ? Et vous venez de causer une heure avec monsieur Belvidera ! Eh bien ! c’est que le mari a jugé à propos d’être à votre égard aussi discret que sa femme. Ah ! cette fois-ci, c’est de la discrétion, ou je ne m’y connais pas… Par exemple, je coupe là ma confidence, moi, vous avez l’air de l’apprécier si peu ! Je ne vous en dirai pas plus long. D’ailleurs, ajouta-t-elle, je crois que j’ai rempli mon rôle et je ne vous retiens plus. Vous pouvez vous retourner et aller vous promener à présent. Adieu ! adieu ! fit-elle, en imitant, avec une malignité visible, le geste qu’avait eu Mme Belvidera en la quittant.

Il se retourna ainsi qu’elle l’y avait invité avec une intention évidente, et aperçut à une cinquantaine de mètres, au pied de l’extrémité de la terrasse, M. et Mme Belvidera s’éloignant dans une barque, dans la direction de Cadenabbia, sur l’autre rive du lac.

— Adieu ! adieu ! répétait derrière lui Mme de Chandoyseau ; car elle était restée seule sur le seuil de la porte de l’hôtel, pour jouir de sa figure à la vue de la barque qui semblait confirmer son amicale confidence.

Il se laissa tomber sur un banc, et eut un très court instant la sensation que toutes les choses tournaient autour de lui.

L’intention perfide de Mme de Chandoyseau était claire, mais, ignorant qu’il était de la conversation qu’elle avait eue précédemment avec Mme Belvidera, son insinuation avait un aspect assez véridique.