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MADEMOISELLE CLOQUE

ble à la poursuite d’un tel sujet, car elle avait aigri Mlle Cloque. Décidément il était bien difficile de contenter tout le monde. À part lui, pour le moment, sa partie de piquet lui suffisait. Il s’y absorba. Mais cinq heures et demie sonnèrent sans que la jeune fille fût de retour. La vieille tante avait des distractions qui rendaient le jeu difficile. Elle prononça tout haut, malgré elle :

— Où est-elle ?

— La voici, dit l’abbé en ramassant une carte qui était tombée.

— Je parle de ma nièce, dit Mlle Cloque.

— La chère enfant ! fit M. Moisan que l’inquiétude n’atteignait point, voyons, décidément, qu’en faisons-nous ? Il faut pourtant la marier.

— Il vaut mieux attendre que de faire cela à la légère.

— Sans doute, sans doute.

— Il est vrai, que si je venais à lui manquer, la pauvre petite, je me demande ce qu’elle deviendrait !

— On ne sait qui vit, qui meurt…

L’abbé était très embarrassé de placer ce qu’on l’avait évidemment chargé de dire, et il voulait malgré tout s’en soulager, par acquit de conscience. Il étendit la main au-dessus du petit tapis vert, jusque sur le bras de sa partenaire, comme pour prévenir un mouvement de révolte, et lui glissa sans la regarder :

— Si — à Dieu ne plaise, — il y avait jamais