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MADEMOISELLE CLOQUE

que cet homme possédait des connaissances techniques, une sorte de science, quelque chose enfin qui le releva un peu à ses yeux. Mais quelle idée d’aller parler de cela à une vieille fille qu’on n’a jamais vue !

L’abbé Moisan jugea qu’il était temps d’opérer un contact entre les deux principaux intéressés. Il remua son siège, le posa de biais, cogna contre des chaises voisines qu’on recula complaisamment par égard pour un ecclésiastique ; il parvint à faire vis-à-vis au notaire et lui tapa sur le genou :

— Eh bien ! dit-il, j’espère que vous êtes à votre affaire : on sait que vous vous y connaissez en musique !

— Oh ! oh ! fit modestement le notaire.

— Monsieur est musicien ? demanda Mlle Cloque.

— Oh ! mon Dieu, Mademoiselle, je râcle un peu de violon… comme tout le monde…

— Comme tout le monde !… dit l’abbé, ah ! que non pas ! Ce n’est pas déjà si commun.

— Et vous, Mademoiselle, dit le jeune homme à Geneviève, vous êtes musicienne aussi, sans doute ?…

C’était la première parole qu’il lui adressait.

Sa voix trébuchait sur un imperceptible trémolo, et, comme il s’était commandé de profiter de cette occasion de parler, il avait débité cette phrase sans aucun naturel, mais au contraire.