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LE PETIT BONHEUR

cier s’était levé aussitôt son passage et marchait derrière elle. Il la devança vite et fut à côté d’elle, le képi à la main.

— Madame, dit-il, peut-être suis-je indiscret ; mais j’avais un grand désir de vous présenter mes hommages.

Elle avait rougi, et elle pâlissait. Il savourait son trouble insurmontable. Il demanda des nouvelles de la tante. Elle crut devoir s’informer de la santé de sa famille. Elle entendait sa propre voix trembler.

Elle fut prise de honte, d’une honte soudaine, qui la stupéfia et l’affola. Elle salua le jeune homme très sèchement et s’engouffra, comme une plume que le vent chasse, dans le couloir du dentiste.

Elle montait l’escalier sans rien voir, la conscience anéantie, son cœur faisant plus de bruit que ses pas. Quelqu’un montait plus vite qu’elle. Elle se rangea. Elle poussa un cri. C’était lui qui l’avait suivie. Il disait :

— Pardon ! pardon !… Je ne pouvais pas vous quitter comme cela… Je n’aurai peut-être jamais l’occasion de vous revoir… Je… Je vous aime toujours.

Suffoquée, arrêtée malgré elle sur la marche, au lieu de fuir, elle eut l’imprudence de dire :

— Ce n’est pas vrai ! au lieu de manifester son indignation.

À ce mot, lui fut certain qu’elle l’aimait. Mais