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LA LIBRAIRIE PIGEONNEAU-EXELCIS

der carrément la question. Ses membres tremblaient ; il lui semblait qu’elle tînt sur les genoux sa chère petite Geneviève et qu’elle l’étouffât comme un pauvre pigeon. Elle la revoyait, hier encore, la tête sur son épaule, lui faisant son joli aveu d’amour et de confiance en le jeune homme dont elle allait elle-même placer le père sur le banc des accusés.

Elle avait fait signe qu’elle voulait parler, ce qui avait rendu attentif autour d’elle, car elle était ordinairement comme un oracle pour toutes ces dames ; et l’émotion lui coupait la voix. Enfin, elle dit :

— Il faut savoir tout sacrifier quand les grands intérêts de la religion sont en jeu. Je ne voudrais pas que l’on s’interdît de rechercher la lumière qui peut être très cruelle pour nous, mais qui peut aussi innocenter ceux qui souffrent de nos soupçons…

Cinq ou six dames, qui parurent lancées par un ressort, sautèrent confusément dans la brèche qu’ouvrait Mlle Cloque :

— Ma bonne amie, croyez qu’il est aussi douloureux pour notre cœur que pour le vôtre de nous voir contraintes à juger sévèrement la conduite de personnes…

— Ah ! ça, s’écria M. Houblon, qu’est-ce que c’est que tout cela ? De qui voulez-vous donc parler ?

— Comment ! objecta quelqu’un, vous ne savez rien ? D’où sortez-vous ?